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Chronique : Falling In Reverse - Popular Monster


Voulant un temps se focaliser sur la sortie de singles indépendants plutôt qu'un album complet, afin de, je cite, "mettre toute ma créativité dans une seule chanson au lieu de mettre toute ma créativité dans 10 chansons et d'être pressé de les sortir", Ronnie Radke a finalement changé d'avis, pour notre plus grand plaisir, et nous propose le 5ème album de Falling In Reverse (post-hardcore), Popular Monster, 7 ans après Coming Home !

Un peu refroidi aussi par le mauvais accueil de Coming Home, un disque pourtant rempli de qualités, très sobre dans sa présentation et qui s'aventurait vers le space rock. Un disque plus sérieux, qui, je pense, était pourtant nécessaire à ce stade de sa carrière, après 2 albums beaucoup plus orientés fun et rap. 

Ronnie a su se relever, single après single, peaufinant chaque nouvel extrait proposé pour en faire LE tube. Le morceau incontournable du moment devant lequel toute la toile rock/metal allait s'enjailler, aidé par des clips visionnaires réalisés de main de maître par Jensen Noen. Ce sont ces morceaux sortis depuis 2019 qui sont compilés ici (mais pas tous, il manque "Losing My Mind", "Losing My Life" - un de ses meilleurs singles, vraiment dommage - "Drugs" ft. Corey Taylor et 2 de ses magnifiques réinterprétations orchestrales), aux côtés de 4 inédits.

C'est également le premier album studio du groupe avec le guitariste Max Georgiev, le bassiste Tyler Burgess et le batteur Luke Holland. Ce Popular Monster nous arrive donc un line-up entièrement renouvelé.


L'album s'ouvre sur "Prequel", qui, bien loin d'être une simple intro, se révèle une véritable tuerie. Le morceau débute avec un "Dear Diary" en spoken word, faisant penser aux confessions de Nikki Sixx dans l'émouvant "X-Mas in Hell" de Sixx:A.M.. Ronnie y fait le constat de ce qu'il a traversé ces derniers temps : "J'ai vécu beaucoup de trucs cette année/Je veux juste clarifier certaines choses/Je n'aime pas quand les gens parlent dans mon dos et pas en face/De nos jours, ça semble tellement faux." L'intensité montera crescendo jusqu'à un final véritablement épique, avec des chÅ“urs grandiloquents, des guitares heavy et de superbes cris. 

Le dernier couplet est un véritable cri de ralliement qui invite à se battre pour faire entendre sa voix, en dépit de ce que les gens peuvent penser, contre tous ceux qui l'ont accablé :

"Tu es esclave du travail et tu loues les fascistes
Tu embrasses la main qui prend la moitié de tes impôts
Faire semblant de s'indigner et se faire voir, une génération sans estime de soi
Il est temps de se lever et de s'opposer à eux, de briser les chaînes et de voir enfin la vision
Nous sommes post-traumatiques à cause d'un système brisé
Suivez-moi dans le moteur du chaos.
"

Le titre suivant, "Popular Monster", sorti il y a 4 ans, est le plus ancien, et le seul sur lequel figure le guitariste Derek Jones, décédé en 2020. Il résume à lui tout seul le concept du disque : 

"C'est l’histoire d’un héros faussement accusé et démoli par la société. Cela montre ce qui se passe lorsque vous êtes poussé trop loin. Vous devenez exactement ce qu'ils disent que vous êtes, exactement ce qu'ils veulent que vous soyez : un monstre."

Il y parle des accusations contre lui, mais aussi de sa dépression : "Je lutte contre la dépression, mais la question demeure/Est-ce du stress post-traumatique ou est-ce que je réprime ma rage ?" Couplets rap poignants sur une instru inquiétante, gros refrain arena-rock, et un final plus qu'intense sur des cris et un breakdown de folie… Rien d'étonnant à ce que le single soit devenu double disque de platine. 


Les ingrédients de la formule ne vont pas forcément énormément varier tout au long du disque, mais ils seront toujours savamment dosés et alternés, avec un mélange de rock et de rap, entre les morceaux mais aussi au sein même des morceaux. 

Au niveau des gros titres rock, le tube "ZOMBIFIED", avec son riff super efficace, est celui qui témoigne de la manière la plus directe de la croisade anti-woke de Ronnie, à travers un refrain qui donne envie d'être repris en chÅ“ur  : "Oh non, ils ne lâcheront jamais prise/Sur quelque chose que tu as dit il y a 10 ans/Ils te cancellent/Et ils ne s'arrêteront pas tant que tout le monde ne sera pas ZOMBIFIÉ." Lui aussi disque d'or. On apprécie également la nouveauté "Trigger Warning", avec un groove de ouf, un super synthé indus (qui fait penser au dernier single de Marilyn Manson) ainsi qu'un solo de piano super original sur le pont. La chanson se moque de l'hypocrisie des Américains qui prétendent être libres et forts alors que les gens sont sensibles et faibles d'esprit, dans une société où tout est contrôlé par les médias. Et si vous vous exprimez, vous êtes cancel.


Et puis il y a bien sûr "Ronald" (d'après le vrai prénom de Ronnie), un morceau de metalcore/bourrinage intensif sur lequel Alex Terrible de Slaughter To Prevail viendra prêter ses gutturaux, avant que le rappeur Tech N9ne ne prenne le relais sur la fin. Curseur de violence à 300%, breakdowns de malades mentaux, et on terminera sur des cris de porcinets. Une véritable profession de foi pour Ronnie : "Je ne veux pas mourir, mais je ne vais pas vivre dans un endroit si froid, dans un monde comme celui-ci/Crucifiez-moi, c'est un blasphème/Jetez-moi dans le feu, laissez-moi brûler pour l'éternité/Je ne serai jamais celui qui reculera, qui se retournera et s'enfuira/ Jamais, jamais, jamais reculer."

Comme on l'a dit, les genres se mélangent constamment, ainsi le nouveau titre "Bad Guy" débute sur un rap et part en rock au bout de 30 secondes, avec un refrain simple mais efficace, mise en abyme de l'image de Ronnie : 

"Parce que je suis le méchant, je suis un loser
Je suis un psychopathe, crois les rumeurs 
J'ai de mauvaises pensées, j'ai de mauvaises vibes
Je n'agis pas bien, ravi de te rencontrer 
Parce que je suis le méchant, je suis un sauvage 
Je suis obsessionnel, je suis dramatique."

Des tubes en veux-tu en voilà, avec encore 2 singles disque d'or : "Voices In My Head", dans lequel Ronnie parle encore de sa dépression dans des couplets rap intenses (et un refrain rock un peu plus classique) : "Les voix dans ma tête continuent de me supplier de rester, si j'appuie sur la gâchette maintenant, les démons vont s'en aller" et "Watch The World Burn" avec ses nombreux changements de rythme, le rap se mélangeant au rock avec un flow qui n'a rien à envier à Eminem (l'une des idoles de Ronnie). On note que les passages rappés sont presque toujours accompagnés de chÅ“urs mystiques, ce qui donne clairement une autre dimension à ces moments, loin du rap de teubé qu'on entend à la radio (pour ceux qui l'écoutent encore). 


Même s'il fait un rap plus classique sur "NO FEAR", on retrouvera ce côté grave et ces orchestrations géniales, à la Hollywood Undead, et un passage rock au milieu. Le texte aborde la dégénérescence de la société et le stress ambiant : "De nos jours les gens ont trop peur/Parce que dire ce que tu penses est comme marcher sur une mine/De nos jours, les gens ont empiré/Je pense qu'on doit se purger, parce que le monde est en déclin."

Et si vous n'avez pas eu votre dose de diversité (lol) entre le rock et le rap, il reste un titre un peu à part, "All My Life", avec Jelly Roll, qui mélange la country au post-hardcore du groupe, et dans lequel les deux hommes se livrent sur leur luttes personnelles, leurs tendances autodestructrices et leur désir de rédemption et de changement. Personnellement c'est celui que j'apprécie le moins, et pourtant je l'apprécie quand même. Il arrive peut-être un peu trop tôt en piste 3. 

On terminera avec la magnifique réinterprétation au piano du classique "Last Resort" de Papa Roach. On imagine que la ligne "Tout a commencé quand j'ai perdu ma mère, pas d'amour pour moi-même et pas d'amour pour les autres" faisait écho à Ronnie, qui a été abandonné par sa mère lorsqu'il était enfant [cf le titre "The Day I Left the Womb" d'Escape The Fate]. Un titre qui vous flanquera des frissons, et qui témoignera, s'il le fallait encore, de ses capacités vocales impressionnantes. De toute façon, c'est un exercice (les réinterprétations au piano) qu'il maîtrise complètement, parvenant à offrir une dimension complètement différente aux versions originales. Si on voulait être pointilleux, on dirait qu'on connait un peu la formule (qui peut s'appliquer à tout l'album aussi), avec une intensité crescendo avant de finir sur un final hurlé ou en breakdowns. C'est classique, et c'est peut-être ce qu'on attend tous aussi. Mais ça serait injuste de résumer sa formule à ça, tant il propose des façons différentes de chanter ou rapper tout au long du disque. 

Popular Monster est incontestablement le meilleur album de Falling In Reverse à ce jour. Ronnie utilise tout le savoir-faire accumulé au cours de sa carrière, et chaque piste y a été pensée pour être un tube en puissance. Le frontman s'y montre vrai, continue d'ouvrir sa gueule tout en témoignant de ses failles et ses traumas. Il y fait un constat sur lui-même en même temps que sur la société, à travers des hymnes rock/rap à l'efficacité imparable. Et je ne l'ai pas précisé avant mais la présence de chaque invité est pertinente, apporte son petit plus sans venir gâcher l'ensemble (et ça aurait pu, tant le tout est hétéroclite). Un disque à se passer en boucle. 

Alucard

Note du rédacteur : 4,5/5

Les + :
- Tube sur tube
- Un disque varié et maîtrisé qui passe régulièrement du rock au rap
- De la profondeur dans les textes

Les – :
- Trop court ?
- Une structure de morceaux qui peut se ressembler un peu

1. Prequel
2. Popular Monster
3. All My Life (feat. Jelly Roll)
4. Ronald (feat. Tech N9ne & Alex Terrible)
5. Voices in My Head
6. Bad Guy (feat. Saraya)
7. Watch the World Burn
8. Trigger Warning
9. Zombified
10. No Fear
11. Last Resort (Reimagined)

Bonus, un petit message de M. Shadows d'Avenged Sevenfold

"Le truc avec Ronnie, c’est qu’il a le droit d’avoir une opinion. Et son opinion irrite des gens, puis il s’en prend à certaines de ces personnes qui l’attaquent. J’ai examiné toutes ses accusations. Il n’y a aucune preuve à cet égard. Il a purgé sa peine pour la seule chose qu’il a faite. Et c’est presque comme si dans cette société tu ne peux pas revenir et avoir une carrière ou quoi que ce soit d’autre qui se passe, parce que tu n’aimes pas que ce gars soit une tête brûlée et qu’il aille te répondre en retour."

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