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Chronique : Helloween - Helloween


Helloween n'est pas un groupe de power-metal, Helloween est le power-metal : ils ont posé les fondations du genre avec l'album Keeper Of The Seven Keys en 1987. Un avenir doré s'ouvrait à eux... mais des problèmes divers et variés, pas simplement personnels ou musicaux, ont rapidement provoqué des tensions internes au groupe, menant aux départs du guitariste et co-fondateur Kai Hansen en 1989, puis du chanteur emblématique (du groupe et du genre) Michael Kiske en 1993. Pendant assez longtemps, l'ambiance était restée assez tendue, mais à force de se recroiser ici et là, et comme seuls les imbéciles ne changent pas d'avis, tout le monde a fini par se rabibocher amenant Kiske et Hansen à rejoindre en 2016 ce qui était la formation de Helloween depuis 2008. Si bien qu'il y a maintenant sept musiciens dans le groupe, dont trois guitaristes, deux chanteurs potentiellement à temps plein et un troisième à temps partiel (Kai s'étant certainement trop abîmé les cordes vocales pour continuer à être seul chanteur d'un projet, en plus d'assurer la guitare). Ca fait beaucoup de monde, mais ce sont de bons musiciens, qui ont absolument l'habitude de se placer "musicalement" dans un groupe de power metal : la tournée organisée pour marquer le retour des deux musiciens historiques est un grand succès, tout le monde est donc embarqué pour un nouvel album, et c'est ainsi que Helloween, l'album, sort en juin 2021. 

L'album commence assez bien : "Out For Glory" est un titre qui pourrait être emblématique de Helloween, avec une introduction qui pose le décor, puis ça accélère un peu, des tougoudoums à la basse typiques du metal des années 80, Kiske chante de manière très posée, un peu de variations à droite à gauche… malgré tout, on sent un côté "exercice de style" ? Comme si Michael Weikath (guitariste) voulait montrer qu'il n'a pas besoin de Hansen pour composer de bonnes chansons longues ? Oubliant que le plus important dans une chanson est de ne pas l'obliger à s'étirer, il faut que ça vienne tout seul ? Ca n'est pas flagrant, mais… heureusement que les solos arrivent pour amener un peu autre chose vers la fin, et chanson finit tout à fait bien. Au final, il n'est absolument pas question de dire que la chanson serait mauvaise, bien au contraire, c'est plutôt qu'elle "remplit toutes les cases", avec tout ce que ça peut impliquer.


La suivante, "Fear Of The Fallen" montre, comme très souvent, comment Andi Derris (chanteur, avait succédé à Kiske et n'a plus quitté le groupe) peut être un chanteur au timbre très irritant, par contre c'est un excellent compositeur pour le genre : là, on a les petites subtilités qui permettent d'entretenir l'attention de l'auditeur pendant toute la chanson. Et on peut pleinement apprécier les voix de Kiske et Deris, qui se complètent très bien : le premier a une voix très propre et toujours très juste, le deuxième est beaucoup plus rocailleux et côtoie souvent le presque faux, et alternativement comme ensemble ça sonne vraiment très bien. Au deuxième tiers de la chanson, nous avons même droit à un joli pont très calme, tout en contre-temps, où Kiske peut faire sonner l'admirateur d'Elvis Presley qui sommeille en lui, et on sent bien qu'il adore prendre cette voix. De manière générale, et comme souvent, les titres composés ou co-composés par Deris sont peut-être les meilleurs de l'album : on s'agite beaucoup, on s'amuse, on devient plus sérieux, même quand la chanson est moyenne il y a toujours "le petit truc" qui arrive à nous accrocher. Dans ses participations à la composition de l'album, on peut sans doute recommander "Fear Of The Fallen", "Best Time" (co-composée avec Sascha Gerstner, guitariste) et "Cyanide".


L'inconvénient de cet album est qu'il traverse un passage assez mou qui dure quelque peu : "Mass Pollution" commence à être moins engageante que le début de l'album, mais elle conserve suffisamment de petits moments pour maintenir l'intérêt. "Angels" propose un joli moment-crooner de Kiske, mais ça n'est pas suffisant pour garder notre intérêt sur toute la chanson. "Rise Without Chains" commence bien… mais s'essouffle vite : on ne peut certainement pas dire qu'elle est mauvaise, mais elle n'accroche pas non plus, on comprend vite la structure générale et le groupe n'en sort pas assez (accessoirement, la voix de Deris est vraiment trop souvent à la limite du faux sur ce titre, ça finit par stresser votre humble chroniqueuse). "Indestructible" est une vraie chanson de bassiste : c'est puissant, lourd(, on marque bien le temps), elle pourrait décoller, mais ne décolle jamais vraiment… d'où un côté frustrant, or ce n'est jamais bon de frustrer son auditoire. Ceci dit, parmi les chansons du ventre mou, c'est sans doute la meilleure, de loin (noter les solos, qui n'ont a priori rien d'exceptionnel, mais accrochent tout à fait). Puis vient "Robot King". Titre de Weikath : il a voulu faire long. Et puissant. Oula oui. Alors il étire, il étire, encore plus que sur "Out For Glory" : ici la chanson est en réalité assez lente mélodiquement, c'est surtout la batterie qui emporte le tout, on reste globalement dans les mêmes structures, répétées, répétées, répétées… alors oui, parfois on monte dans les aiguës, puis mediums, de la mini variété rythmique, ouah, quelle diversité, mes aïeux. J'aime bien Weikath en général, il m'amuse beaucoup sur scène, mais sur cet album on sent vraiment trop qu'il a voulu se prêter à un exercice de style, du type "il n'y a pas que Kai qui sait faire des chansons longues, je vais vous montrer !" Sauf que, même si on met sa chanson en tout dernier, Kai fait varier ses chansons, c'est pour ça que ça peut être long sans lasser… nous allons y revenir.


Au bout du compte, ce ventre mou compte quand même 5 titres, avec certaines chansons vraiment - vraiment longuettes : ça fait beaucoup. Heureusement, Andi Deris vient à notre secours avec "Cyanide" : probablement pas la chanson du siècle, mais elle réveille, fait bouger le cou et pas simplement tapoter le pied, merci Andi ! "Down In The Dumps" a une très bonne introduction, ça s'aplatit un peu après mais ça reste correct, et surtout la chanson n'est pas étirée à outrance (un peu quand même, mais ça reste acceptable) : enfin une bonne chanson de Weikath, merci Michael ! Puis un court instrumental où Kai Hansen s'amuse avec un effet de guitare, et "Skyfall" peut commencer : chanson de 12 minutes, qui passent comme une lettre à la Poste. Parce que c'est varié, réellement, il y a une histoire racontée par les paroles et la musique, on s'exerce le cou tout en braillant à tue-tête, on se rentre dedans, on chante briquet à la main, enfin il y a de tout dans cette chanson. Y compris quelques moments pour briller pour chacun des musiciens de Helloween (même Kiske a son moment-crooner). Une vraie bonne chanson qui nous fait totalement oublier son nombre de minutes : merci Kai ! Espérons juste que s'ils la jouent en concert, ça sera la version complète et pas celle passée à la tronçonneuse pour avoir un clip de cinq minutes.

Les sept musiciens ne se "mangent" pas musicalement, chacun a tout à fait la place de s'exprimer, et laisse aux autres toute la place dont ils ont besoin : les deux anciens sont revenus parce que l'ambiance est redevenue agréable entre tout le monde, et ça s'entend. Pour autant… est-ce que ces 12 titres sont vraiment les 12 meilleurs parmi ceux prêts au moment de l'enregistrement de l'album, ou ont-ils voulu ménager la chèvre et le chou entre les divers compositeurs de l'album ? A l'écoute -du- titre de Kai Hansen, votre humble chroniqueuse ne peut que pleurer un peu plus la disparition de Gamma Ray, surtout en entendant le reste de l'album… ainsi va la vie, c'est sûr, mais il n'empêche que. Le ventre mou est assez long, mais il reste totalement compensé par le reste de l'album : même si on ne peut pas dire que c'est l'album du siècle, il est indéniable que l'album Helloween, dans son ensemble, vaut absolument le coup. D'autant que ça fait plaisir d'entendre ce qui semble être une bonne entente musicale chez des gens qui ont pu être à couteaux tirés, à une époque maintenant lointaine. Est-ce que ça sera suffisant pour s'embarquer sur un deuxième album ? Peut-être, la prochaine tournée donnera sans doute un début de réponse, de toute manière ils ont l'air d'être dans un état d'esprit proche du "un engagement à la fois". 

Cet album a assurément ses très bons moments, mais aussi ses longueurs : le groupe gagnerait sans doute beaucoup à sélectionner les chansons pour leurs qualités et non parce que tel musicien veut absolument être présent dans les compositeurs de l'album, mais ça voudrait très certainement dire froisser des égos, et on peut parier que, là, l'ambiance serait beaucoup moins bonne. Probablement un mal pour un bien, donc, et apprécions les bonnes chansons présentes sur cet album.

Polochon.

Note de la rédactrice : 3,5/5

01- Out for the Glory
02- Fear of the Fallen
03- Best Time
04- Mass Pollution
05- Angels
06- Rise Without Chains
07- Indestructible
08- Robot King
09- Cyanide
10- Down in the Dumps
11- Orbit
12- Skyfall

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