Chronique : Beartooth - Below

En 2008 un certain groupe nommé Attack Attack! lâche sur internet son single "Stick Stickly" et sa vidéo prônant le crabcore, une danse ridicule, pour devenir la risée d'internet et de la scène metalcore. Quelques part dans cette vidéo, vous trouverez caché derrière son clavier un gamin de quinze ans à peine, nommé Caleb Shomo, qui n'avait probablement aucune idée de la carrière qui l'attendait. La suite, tout le monde la connaît : l'album deviendra ironiquement culte, le leader Austin Carlile sera évincé du groupe pour former Of Mice & Men, Caleb prendra son poste, et tout ce petit monde connaîtra un joli succès que personne ne leur aurait prédit. Mais c'est à l'âge adulte que Caleb prendra son envol avec son propre groupe : Beartooth. Metalcore violent et fun mais aux lyrics très sombres, représentant sa dépression chronique. Succès fulgurant pour lui, à des années lumières de Attack Attack!. Un EP et trois albums plus tard, Below arrive.

Très inspiré par l'isolation due au confinement mondial, le frontman lâche sa frustration sur ce nouvel opus, pour un résultat méchamment détonant. On commence avec le morceau titre "Below", survolté et rageur, et on enchaîne avec l'excellent single "Devastation", qui porte bien son nom pour le coup : c'est nerveux, lourd, violent, mais tout aussi fun avec un refrain catchy et un breakdown final dément. Ce schéma, assez classique chez le groupe, sera une partie intégrante de l'album. "Fed Up" avec son rythme punk et entraînant, "Phantom Pain" et ses riffs diaboliquement grinçants, "Hell of It" ou encore "Dominate" et sa double pédale, qui nous démange l'envie de lancer un mosh pit en solo dans le salon : c'est une série de tubes mémorable qui nous en mettent plein les oreilles. Caleb est excellent sur tous les plans : que se soit pour hurler comme une bête enragée ou offrir des refrains chantés à la justesse impeccable comme sur "The Past is Dead", le frontman ne faiblit devant rien. Below sera le genre de disque où chaque titre sera votre préféré avant que le suivant ne s'avère encore meilleur. À la fois plus violents et plus catchys les uns que les autres.

Ceci étant dit, la qualité indéniable des titres n'enlève pas le principal défaut du groupe : il n'y a pas vraiment d'innovation. Le format "couplet hurlé pour refrain catchy" laissera peu de place à du renouveau. Il faut savoir que Beartooth, c'est le bébé de Caleb à 200%. Il ne se contente pas d'écrire l'intégralité des lyrics et de la musique, il agit aussi en tant que producteur et va même jusqu'à enregistrer la totalité de tous les instruments lui-même dans son studio personnel. Autrement dit, la moindre note que vous pouvez entendre sur les disques provient très probablement des mains et de la voix du bougre, laissant le rôle des autres membres du groupe uniquement pour les performances live (et rendant leurs départs du groupe tristement anecdotiques). Ce qui offre une continuité d'une certaine logique et un gage de qualité au groupe, mais aussi un peu de répétition au fil des albums. Et même si le songwriting de Shomo s'affine comme du bon vin au fil des années, la saveur est certes plus raffinée à chaque disque, le goût en lui même reste exactement le même.

Mais Below offre quand même son petit lot d'exception : "Skin" et son refrain poppy qui ferait presque penser à A Day to Remember, fonctionne très bien et s'avère être une agréable surprise. De même pour "I Won't Give Up", un côté légèrement punk rock qui s'allie au metalcore d'une jolie façon pour offrir un des meilleurs refrains du disque qui fera un sacré effet en live sans le moindre doute ! Mention spéciale pour "The Last Riff", titre entièrement instrumental et inquiétant qui conclut l'album sur de bons riffs bien grincheux.

Below ne se démarque peut-être pas beaucoup de ses prédécesseurs, mais s'avère encore plus maîtrisé et subtil qu'eux, ce qui en fait le meilleur album du groupe à ce jour. La violence est plus prononcée et les refrains sont plus entêtants que jamais. La production très propre manie le tout pour un résultat homogène et efficace du début à la fin, où tout semble être à la juste dose. Below sera cependant probablement la consécration de ce que Beartooth sait faire dans ce domaine : si la formule du groupe est ici polie et perfectionnée pour un disque quasiment sans faute, trop tirer sur cette corde risque de fatiguer les auditeurs sur les prochains albums, et un peu de surprise pourrait apporter son petit plus la prochaine fois, peut-être en laissant le reste du groupe apporter son influence ? En attendant, le disque fera le job plus que dignement, et vous offrira son lot de mélodies qui resteront gravées en tête toute la journée entre deux couplets hurlés pour un défouloir de qualité. On dit un grand merci au crabcore !

Eddy F.

Note du rédacteur : 4/5

01. Below

02. Devastation

03. The Past Is Dead

04. Fed Up

05. Dominate

06. No Return

07. Phantom Pain

08. Skin

09. Hell Of It

10. I Wont Give It Up

11. The Answer

12. The Last Riff