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Chronique : DIIV - Frog In Boiling Water


Quatrième album pour les New-Yorkais de DIIV (indie rock/dream pop/shoegaze), qui, après plusieurs années de travail, de tournées acharnées et un changement de label, nous dévoilent Frog In Boiling Water. Un curieux nom faisant référence au fait réel qu'une grenouille cherchera à s'enfuir si elle est plongée dans l'eau bouillante, mais que celle-ci restera calme si elle se trouve dans une eau tiède qui commencera à bouillir lentement, quitte à mourir progressivement sans le comprendre. Un concept qui sera ici appliqué à la condition humaine : quand l'effondrement du monde et les horreurs quotidiennes nous bercent lentement dans une crise existentielle où nous sommes les êtres lentement bouillis, acceptant notre destin. Oui, le programme est assez peu joyeux. 

Il faut dire que l'histoire de DIIV s'est écrite dans la douleur. Bien qu'Oshin, le tout premier album du groupe, nous offrait un mélange de shoegaze et de rock-indé pour un disque particulièrement léger et insouciant, les choses prirent rapidement une tournure compliquée pour le frontman Zachary Cole Smith, pris dans les tourments de son addiction à l'héroïne qui lui vaudront une arrestation par la police avec son ex-copine, la chanteuse/mannequin Sky Ferrera. Tant de débâcle qui résonnent sur le second disque Is The Is Are, chef d'Å“uvre absolu ou le mélange shoegaze-indie prend une tournure nettement plus sombre, dépeignant le sujet de l'addiction avec une honnêteté saisissante. Ces mêmes démons seront pourtant surmontés par Smith, en cure de désintoxication, qui sera finalement le sujet du troisième disque de DIIV : Deceiver. Un album plus dur et grunge, mais toujours avec la sensibilité d'un frontman enfin en paix avec lui même. 

Comme une trilogie, l'aventure de DIIV et de leur décente aux enfer avant de retourner à la lumière était bouclée. Laissant à se demander quel serait la ligne artistique de ce quatrième disque. La réponse avec Frog In Boiling Water sera finalement logique : ne plus parler de soi, mais parler du monde autour de nous. Pour la première fois DIIV s'engage et tente d'écrire sur des sujets plus grands. Musicalement, les choses resteront assez proche de Deceiver : un shoegaze sensible et grunge, entre mélancolie et rock rempli de dissonances, mais avec un retour à un son orienté rock alternatif proche de Is The Is Are. Un mélange qui s'entend dès les premières secondes avec "In Amber" titre sombre, lourd, à la production froide et où l'intensité sera toujours mise à égalité avec la voix douce et en retrait de Cole Smith, et vous voilà en route pour 10 excellentes chansons de rock triste et sincère. 


Telle la bande sonore d'une après-midi pluvieuse, c'est une déferlante de morceaux calmes et mélancoliques. Le single titre "Frog In Boiling Water" sortira du lot par sa simplicité et son riff résolument catchy, mettant en avant les thèmes engagés que Diiv espère partager. Difficile aussi de résister à des morceaux aussi magnifiques et légers que "Little Birds" ou "Soul-net" dont le calme et la pureté n'aurons d'égal que la noirceur. Si "Reflected" ou l'excellent "Somber The Drums" apporteront une énergie plus prononcée et un contraste appréciable, les thèmes resteront toujours aussi pessimistes avec des paroles reflétant les conflits mondiaux actuel : "Our lies are done, the good guys won and everybody had fun. This swarm of flies, a pool of lies, slices of life: we kill then we die.

Dans toute cette noirceur, DIIV prendra cependant le temps de parsemer des titres aux sonorités moins moroses qui apporteront du souffle à une tracklist relativement courte. "Brown Paper Bag" par exemple, premier single partagé qui décrit avec une pointe d'humour comment trouver sa place lorsque vous vous sentez comme un vulgaire sac en papier traînant au sol. Un titre fun et rock qui garde les thèmes lourd du disque avec une bonne dose de second degré cette fois. 


Il en va de même pour la ballade acoustique "Everyone Out", une bouffée d'air frais aux paroles volontairement naïves, comme un rappel qu'il est encore important de garder une innocence dans un monde qui n'en a plus. C'est aussi sur ce petit message d'espoir que ce clôture le disque avec "Fender on the Freeway" un titre aux influences presque midwest emo avec un son proche d'un Mineral ou American Football, qui conclu un disque sombre de la plus douce des façons. 

C'est donc une réussite pour le retour des New-Yorkais. Si les titres peuvent paraîtres légèrement répétitifs et monotones aux premiers abords, c'est au fil des écoutes que l'album révèle toute sa magie. Les fans du groupe sauront à quoi s'attendre, et tout amateur de shoegaze qui n'est pas encore familier avec DIIV aura ici un album idéal et simple pour ce familiariser avec eux pour la première fois. Frog In Boiling Water est une expérience douce-amère, perdue entre la beauté du monde et sa cruauté, essayant de porter des messages forts, et ajoutant au passage un autre magnifique album à la discographie de DIIV. 

Note du rédacteur : 5/5

Eddy F

01. In Amber
02. Brown Paper Bag
03. Raining On Your Pillow
04. Frog In Boiling Water
05. Everyone Out
06. Reflected
07. Somber the Drums
08. Little Birds
09. Soul-net
10. Fender on the Freeway

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